Principes

Le Dialogue au Regard de l’Islam

Le Dialogue au Regard de l’Islam

Par Dr Abbas Al-Jirari

De la possibilité d’un dialogue contemporain

Il est communément admis, et presque avec conviction, que le dialogue est une nécessité incontournable. Or, si ce dialogue signifie la conversation avec l’autre, quel qu’il soit, il ne signifie nullement la recherche d’un alter ego comme refuge, c’est-à-dire un autre que soi-même, le Moi étant somme toute bien enraciné. Il n’implique pas non plus le repli fanatique sur soi. Il n’engendre dans les deux cas que discorde et conflit tant avec soi-même qu’avec autrui.

C’est ainsi que le dialogue doit écarter initialement tout élément de défi, endogène soit-il ou exogène, en vue d’assainir l’atmosphère et de mettre en évidence les occasions propices à la rencontre.

Toutefois, si les chances de cette rencontre sont réelles, eu égard à la disposition des partenaires à s’y investir et à ouvrir des perspectives, l’assainissement, quant à lui, présuppose l’élimination de tous les aspects d’antipathie et de toutes les attitudes d’hostilité héritée à travers l’histoire. Il implique également l’effacement des incriminations tacites et franches, souvent lancées à la légère et de manière projective. Elle suppose enfin la nécessité d’écarter le désir ardent d’intervention et d’orientation qui traduit les desseins du plus fort qui s’évertue à exhiber sa supériorité, sa suprématie et partant sa domination qu’il impose à sa convenance. Ce faisant, il sombre dans l’erreur, en ce qu’il désire inféoder l’autre à sa volonté en lui reniant son identité et sa spécificité. Une telle attitude illustre la méconnaissance de l’un des principes élémentaires et des fondements du dialogue, à savoir l’acceptation de l’interlocuteur tel qu’il est, en cherchant des terrains d’entente dans le contexte de la différence.

Cette vision de dialogue n’est nullement en contradiction avec l’esprit, les exigences et l’évolution de notre époque, lesquels ont occasionné l’acheminement vers ce qu’on désigne par « mondialisation ». En effet, comme cette mondialisation est un phénomène contemporain, à caractère civilisationnel et culturel, elle ne doit pas impliquer l’élimination de tout ce qui en diffère. Plutôt, si elle vise l’universalisme, elle se doit de s’ouvrir sur d’autres phénomènes pour les mieux connaître, mieux communiquer avec et se faire féconder par leurs apports. C’est de cette manière que la mondialisation peut se parer du caractère humain qui constitue le lien entre toutes les civilisations et les cultures que l’homme a connues au fil de l’histoire, selon une spontanéité qui semble relever des principes immuables de l’univers. Parmi les implications premières de ces principes, il y a le fait que ces civilisations et ces cultures sont enclines à la cohabitation et à la convivialité, outre leur aptitude au dialogue et à la communication ; qu’elles sont fortes et dominantes ou faibles et dominées, et quelles que soient les confessions religieuses dont elles se réclament et auxquelles elles s’adaptent.

C’est ainsi qu’est mise en évidence la valeur du dialogue au regard de l’islam, qui est conçu comme un modèle à la lumière duquel on peut asseoir un dialogue contemporain sur des bases saines et solides. C’est en effet ce que la présente étude cherche à mettre en exergue, à travers les deux sections qui la composent :

La première section traite de l’importance du dialogue et des fondements de sa réussite. Y sont appréhendés également les conditions du dialogue, ses données historiques, sa nécessité et comment il doit être établi.

La seconde section traite le dialogue tel qu’il est préconisé dans le Saint-Coran, à travers les termes et les vocables qui le signifient. Il y est également question de la méthodologie du dialogue avec des exemples qui l’illustrent.

L’importance du dialogue et les fondements de son succès :

Si l’importance que revêt le dialogue est évidente, elle ne peut néanmoins se concrétiser sans la réalisation d’un certain nombre de ressources qui en conditionnent le succès. C’est ainsi qu’en dépit des multiples tentatives qui ne cessent de le mettre à l’épreuve, ce dialogue requiert encore davantage d’efforts de la part de ceux qui y aspirent, afin qu’ils se rendent compte de sa nécessité et adoptent les modalités adéquates qui permettent de le consacrer.

C’est à ces questions-là que cette section est dévolue. Elles seront traitées en trois points :

1. Conditions nécessaires à tout dialogue.

2. Données historiques du dialogue.

3. De la nécessité du dialogue et de ses modalités.

Conditions d’aboutissement du dialogue

De prime abord, nous dirons que pour que réussisse tout dialogue, il doit être assorti de certaines conditions préalables qu’on peut résumer comme suit :

1. La nécessité de la présence de deux ou plusieurs parties pour que le dialogue ne se transforme pas en un simple monologue.

2. La reconnaissance mutuelle des deux parties engagées dans le dialogue. Elle commence par la prédisposition psychologique à s’ouvrir sur l’autre, avec tolérance, c’est-à-dire l’accepter tel qu’il est.

3. Cette reconnaissance doit s’accompagner d’une appréciation égalitaire, d’une volonté commune, d’une considération réciproque et d’un besoin d’interaction des deux côtés.

4. La nécessité d’ouverture et d’extraversion. Il faut se défaire de la passivité, de l’isolement et de tout ce qui conduit à la mésestime de l’autre, à l’égoïsme, l’ignorance et aux complexes. Il faut aussi s’écarter de toute tendance visant la suprématie, la domination et la tyrannie.

5. Au préalable, se mettre d’accord sur un minimum de principes et de valeurs.

6. Avoir recours à la connaissance judicieuse et être en mesure de l’échanger, dans un esprit de sérénité et de pondération. Chercher à convaincre, sans atteinte à l’interlocuteur, à sa réaction ou à son point de vue, et sans prétention à exclure ses spécificités.

7. S’employer à établir le dialogue dans les limites de données et de perspectives qui ne recèlent pas de provocation de l’esprit et des sentiments. Ce faisant, il faut aussi éviter ce qui offusque les valeurs et les convictions et ce qui implique une hostilité à l’encontre de l’être dans ses dimensions matérielles et spirituelles.

8. Etre animé par la volonté de dissiper les différends, d’éliminer les disparités, de surmonter les facteurs de contradiction, de rétrécir les écarts et de consolider les liens communs.

9. Faire régner le sentiment d’égalité entre les parties concernées. Faire en sorte qu’aucune d’elles ne se sente diminuée ou dans l’incapacité de poursuivre et d’accompagner le processus du dialogue, dans toutes ses étapes, allant de l’échange interactif jusqu’à la compétition et l’émulation.

10. Ceci suppose la définition de la finalité du dialogue, la détermination à l’établir dans la sincérité, la confiance, la modération et l’équité. Ce qui implique aussi sa planification en en précisant les conditions, les objectifs et les parties concernées.

En référence à l’actualité contemporaine, et pour l’essentiel, ces conditions sont susceptibles d’être appliquées à toute forme de dialogue quel qu’en soit le niveau. C’est en effet ce qui ressort des cas de figure suivants :

1. Le dialogue arabo-européen.

2. Le dialogue entre le Nord et le Sud.

3. Le dialogue entre les deux rives de la Méditerranée.

4. Le dialogue entre l’Est et l’Ouest.

5. Le dialogue entre les religions.

6. Le dialogue entre l’Islam et le Christianisme.

7. Le dialogue pour le rapprochement entre doctrines islamiques.

8. Le dialogue politique, social et culturel au sein d’un même pays.

Certains types de dialogue en cours actuellement, notamment entre le Nord et le Sud, ont lieu à partir de l’héritage colonial et à la réalité où chaque partie s’emploie à imposer sa domination, animée d’une assurance telle qu’elle fait fi des conditions élémentaires du dialogue, ignorant l’apport potentiel de l’autre partie. Celle-ci est alors considérée comme étant faible et vulnérable; soit dans les domaines économique et technologique ou dans d’autres, notamment le domaine culturel qui a trait à la vie des individus et des communautés et qui conditionne les relations et favorise le rapprochement entre les hommes.

Placer ce dialogue dans le contexte qui lui sied consiste à ne plus le circonscrire dans son acception traditionnelle d’aide et d’assistance ; laquelle acception recèle un sentiment de supériorité et d’égocentrisme et fait du Moi le modèle de référence. Il s’ensuit alors une attitude dédaigneuse et réductrice vis-à-vis de l’autre partie.

Il est indubitable qu’une telle attitude induit une suspicion de la part de la partie vulnérable à l’égard de la sincérité et de la pertinence du dialogue. Aussi cette partie n’en vient-elle à l’accepter que par nécessité et avec beaucoup de réserve. Elle est ainsi persuadée que ce dialogue, dans son contexte actuel, ne peut contribuer à l’éradication du sous-développement et à l’intégration du monde développé, en y participant par la coopération fructueuse et en œuvrant au rétrécissement, sinon à la suppression, du fossé qui sépare les deux mondes.

Le fait que ce fossé persiste dans sa profondeur et son ampleur est une incitation de toutes parties du dialogue, notamment la plus forte d’entre elles, à la méditation sur ce que cet écart béant soulève comme questions doctrinales et intellectuelles. Il s’agit de la prise en considération des valeurs religieuses et morales, dont l’omission conduit l’individu à se désengager de la foi et à sombrer dans la dissolution des mœurs, en se laissant entraîner par les fléaux des stupéfiants, de l’angoisse et de la violence.

C’est dans ce contexte qu’on peut apprécier l’importance que revêt le dialogue entre les religions. Aussi est-il opportun de méditer sur sa pertinence, de l’appréhender à travers de ses données historiques, notamment le rapport entre musulmans et chrétiens, et de mettre l’accent sur son extrême nécessité et sur les modalités adéquates de sa mise en œuvre.

Le dialogue : données historiques

Le dialogue entre musulmans et chrétiens a toujours été constant et ininterrompu, depuis l’avènement de l’islam jusqu’à nos jours. Toutefois, des affrontements conjoncturels en dehors du cadre des deux religions, ont fait que ce dialogue n’a pas toujours eu une évolution positive à travers les époques.

Le dialogue s’est manifesté dans les espaces de cohabitation entre les musulmans et les communautés d’autres religions révélées. L’Andalousie faisait figure de proue des contrées où régnait alors le climat de coexistence et de tolérance. Il en est de même de certaines régions du Mashreq (l’Orient), notamment Jérusalem, terre propice pour une telle convivialité. Le Maroc, quant à lui, était réputé pour le traitement favorable qu’il réservait aux gens du Livre parmi les juifs, sachant qu’il n’a pas connu la moindre expansion du christianisme.

Le dialogue était également de rigueur dans les débats religieux au sein des cercles scientifiques et dans les mosquées. Certains écrits en ont fait état, comme ce fut le cas de celui paru au VIIe siècle de l’hégire par Sa’d ibn Mansûr ibn Kamûna Al-Yahûdî, intitulé : « La révision des recherches sur les trois confessions : le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam ». C’est un ouvrage édité auquel on peut reprocher un certain ressentiment à l’encontre de l’Islam. A cela s’ajoute tout ce que les musulmans ont connu comme écrits sur les confessions et les doctrines, notamment pendant le rayonnement de la dialectique (‘ilm al-Kalâm).

Pour les musulmans, l’Histoire contemporaine a connu un lien entre le christianisme et l’expansion du colonialisme qui encourageait les campagnes d’évangélisation et combattait l’Islam dans de nombreux pays colonisés.

L’ère contemporaine est une période où plusieurs instances ont entrepris l’initiative du dialogue, notamment le Vatican qui semble être à l’avant-garde en la matière. Ses invitations au dialogue trouvaient souvent un écho favorable auprès des musulmans, en dépit de quelques réserves dues à la fragilité des positions du Vatican vis-à-vis de certaines causes arabes, en particulier, la spoliation du droit arabo-musulman à Jérusalem, en Palestine, et la dérive génocidaire perpétrée en Bosnie-Herzégovine.

Les aspects saillants de ce dialogue peuvent ressortir des éléments suivants :

1. La déclaration du Vatican, du 15 octobre 1965 sur « la relation entre l’Eglise et les religions non chrétiennes ». Elle a été suivie de plusieurs conférences islamo-chrétiennes. La première et la seconde ont été tenues à Cordoue, respectivement, en septembre 1974 et en mars 1977. En outre, le Pape a organisé, en 1986, une réunion avec les représentants des différentes religions, durant laquelle des prières ont été célébrées selon les rites de chaque confession.

Ce qui est à souligner au sujet de l’action du Vatican, c’est bel et bien le fait que l’autorité pontificale a mis en place un Conseil pour le dialogue entre les religions (Pontifcium Concilium Pro Dialogo inter Religiones). Ce Conseil édite un bulletin et une revue intitulée « Etudes Islamo-Chrétiennes » (Islamo Christiano), dans laquelle sont publiés des articles en arabe, en français et en anglais.

En 1964, le Pape a instauré un Secrétariat pour les non-chrétiens (Secretariatus Pro non Christianis-Vaticano), au sein duquel il a créé une section spéciale qui porte le nom d’ »Islam ». Vers la fin des années soixante (67-69), le Secrétariat a publié quatre ouvrages dédiés chacun à la manière de communiquer avec les non-chrétiens, à savoir les bouddhistes, les hindouistes, les musulmans et les religions d’Afrique. En 1984, Il a publié également une étude sur « l’attitude de l’Eglise à l’égard des autres confessions religieuses ».

Il semble que ce Secrétariat a eu en Afrique du Nord et en Afrique d’une manière générale, une action d’envergure qui fut naguère probablement très avantageuse au mouvement d’évangélisation. A ce propos, il y a lieu d’observer l’extrême vigilance afin de ne pas laisser le champ libre aux non-musulmans qui risqueraient de l’exploiter dans des perspectives préjudiciables à l’intérêt des musulmans jusqu’au sein de leur propre foyer.

2. Les actions menées par le Complexe Royal pour les Recherches sur la Civilisation Islamique (Fondation Âl al-Bayt) au Royaume Hachémite de Jordanie, avec le concours de plusieurs instances, dont la Commission autonome des Relations Islamo-Chrétiennes à Windsor, en Grande Bretagne, le Centre Orthodoxe à Chambéry en Suisse et le Conseil Pontifical du Dialogue entre les Religions au Vatican.

Sous le patronage de Son Altesse le Prince Hassan, ex-prince héritier du Royaume Hachémite de Jordanie, sont organisées des rencontres à Amman et au Vatican, auxquelles j’ai été invité en tant que participant. Parmi ces manifestations :

– le colloque sur « L’enseignement religieux dans la société contemporaine », tenu au Vatican, du 6 au 8 décembre 1989 (8-10 Joumâda I 1410 H).

– Le colloque sur « La religion et l’utilisation des ressources de la terre », organisé au Vatican, du 17 au 20 avril 1996 (29 Dhû al-Qiâda – 2 Dhû al-Hijja 1416 H).

3. Certaines universités, en Orient et en Occident, organisent des colloques portant sur des aspects religieux en relation avec des questions d’actualité. C’est le cas, entre autres, de l’Institut du Droit de la Paix et du Développement qui relève de l’Université de Nice (Sophia–Antipolis), lequel a organisé, en décembre 1990, avec le concours de l’UNESCO, un colloque sur « Religions et guerre » et auquel j’ai contribué avec une étude sur « l’Islam : religion de paix et de jihâd ».

Par ailleurs, il est à signaler que l’Université Al-Kalaa de Madrid (Espagne) a organisé, en novembre 1994, la rencontre des trois religions à laquelle j’ai également participé. Elle s’est tenue sous le thème de  » Rencontre des Gens du Livre : engagement pour la paix ». Son objectif était d’instaurer la clairvoyance mutuelle, d’échanger les points de vue et de discuter les expériences qui renforcent les initiatives de la paix dans le monde d’une façon générale et au Moyen-Orient, tout particulièrement.

4. Les efforts déployés par l’UNESCO : On peut en citer la réunion tenue en décembre 1994 à Barcelone et qui a donné lieu à la « Déclaration de Barcelone », ainsi que d’autres réunions sur « le dialogue des cultures », dans le cadre du projet intitulé « Les routes de la foi » et auxquelles j’ai également participé. Ces réunions se sont tenues à Rabat, respectivement, du 19 au 23 juin 1995 et du 18 au 22 juin 1997.

Dans le cadre de ce même projet, il a été organisé à Rabat, le 16 février 1998 (18 Choual 1418 H), sous le Haut patronage de Sa Majesté le Roi Hassan II, que Dieu ait son âme, une journée de réflexion sur « Le dialogue entre les trois religions monothéistes », laquelle s’est clôturée par une recommandation à la création au Maroc d’un « Forum de réflexion et d’action » constitué des représentants des trois confessions monothéistes et qui œuvrera à déterminer des activités ciblant différentes catégories de populations et contribuant à stimuler la compréhension mutuelle et la recherche d’une culture de la paix.

5. La mission assumée, dans ce domaine, par de l’Organisation islamique de l’Education, les Sciences et la Culture (ISESCO) et qui est concrétisée par différents aspects du plan d’action qu’elle a adopté et par le programme d’application qui s’en est suivi.(1) Le point de départ de ce plan consiste en la conception qu’a l’Organisation des spécificités de la culture islamique. Pour l’essentiel, cette culture est caractérisée, par son universalité et jouit d’une crédibilité et d’une force qui tiennent de son origine divine. Ces deux atouts se réfèrent également à la nature humaine et aux principes de justice, d’équité et de dignité humaine. Ces principes sous-tendent ses postulats, ses objectifs et ses valeurs, dans un esprit rationnel dont la validité ne peut être mise en cause.

C’est ainsi que l’Organisation estime que le dialogue établi entre l’Islam et le Christianisme est susceptible de contribuer à la consécration de la confiance mutuelle, à l’établissement de passerelles de coexistence intellectuelle et à l’instauration de relations naturelles entre les gens des deux confessions. Toutefois, un tel objectif devra être inséparable des intérêts majeurs de la nation islamique, en ce sens que l’accent devra être mis sur les valeurs humaines et sur la coordination entre les différentes instances islamiques concernées par le dialogue.

A ce propos, force est de souligner la participation du Directeur Général de l’ISESCO, le Dr Abdulaziz Othman Altwaijri, à des rencontres dévolues à cette cause, notamment le congrès organisé par le Conseil Suprême des Affaires Islamiques en Egypte, entre le 13 et le 16 juillet 1997, sur le thème « L’Islam et l’Occident : passé, présent et avenir ». Il y a donné une conférence intitulée : « Les perspectives du dialogue entre les musulmans et l’Occident »(2).

Ces tentatives(3) visent certes à la consolidation du dialogue entre l’Islam et le Christianisme; en plus certaines d’entre elles aspirent à le compléter en l’étendant aux trois religions révélées. Néanmoins, force est de souligner que les juifs usent de tous les moyens pour régler leurs problèmes avec les chrétiens, fût-il au détriment de ces derniers; comme il a été le cas pour la question d’innocence. Leur dessein est manifestement d’aboutir au même résultat avec les musulmans en ce qui concerne la question d’Al-Qods (Jérusalem) pour devenir les maîtres, étendre leur pouvoir et leur hégémonie à partir de la capitale sainte. Toutefois, il faut rappeler que les musulmans n’excluent nullement les juifs du processus du dialogue. A preuve, les rencontres tripartites organisées à cet effet. Ce faisant, ils sont néanmoins sceptiques quant à la possibilité d’un tel dialogue et encore moins quant à sa pertinence, et ce, tant que ne soit pas manifestement reconnu pour les Arabes et les musulmans leur droit inaliénable à Jérusalem et à la Palestine.

De la nécessité du dialogue et de ses modalités

De nos jours, le dialogue est aussi bien une nécessité qu’un moyen, voire une finalité. Il implique l’oubli des disparités religieuses et le dépassement des pratiques erronées et des attitudes hostiles, bien que les musulmans en aient énormément pâti et continuent à en souffrir. Or, cela ne les a pas dissuadés de poursuivre leur ferme avancée vers la convergence et l’élimination des divergences. Aussi sont-ils entièrement disposés à enterrer les animosités et les inimitiés du passé et ouvrir de nouvelles perspectives pour un avenir que l’humanité est appelée à affronter avec sérénité et rationalisme entre les innovations technologiques de l’époque et les valeurs religieuses susceptibles d’en réfréner les excès ou, du moins, d’en tempérer les effets.

Par cette démarche positive visant le rapprochement, les musulmans n’ont pas cessé de prêcher l’incitation à développer le potentiel commun à toutes les religions révélées. Celles-ci sont en effet traversées de finalités vitales inspirées de la loi divine qui vise la préservation de l’homme et la sauvegarde de sa dignité et qui l’assiste pour qu’il s’acquitte convenablement de la mission qui lui incombe, à savoir le vicariat que Dieu lui a conféré sur la terre.

Agissant ainsi, les musulmans ne procèdent ni par affectation ni par afféterie; au contraire, ils agissent en toute harmonie avec l’esprit de l’Islam et en nette conformité avec les préceptes de la prédication universelle qui assimile les apports des confessions antérieures.

Ainsi, pour que le dialogue soit fructueux et donne des résultats à la mesure des exigences de l’ère contemporaine et des menaces qui guettent à la vie de l’homme, il conviendrait de l’initier par une démarche décisive capable de réaliser deux objectifs primordiaux, à savoir :

Premièrement : la propagation de la conception religieuse appliquée à l’homme, à l’univers et à la vie. Cette conception tient du fait que l’homme est ennobli par Dieu qui l’a créé dans la forme la plus parfaite. Il lui a insufflé son âme, l’a pourvu de bonnes choses, lui a assujetti l’univers et tout son contenu, l’a favorisé à beaucoup de Ses créatures, en le dotant des bienfaits de l’intellect et de la science et puis Il lui a confié la charge de Sa succession sur la terre. Une telle responsabilité implique des droits et des obligations que l’homme se doit de préserver et de protéger de l’abus, pour que la vie se perpétue selon la Volonté divine. Cette volonté suprême vise à éprouver la bonne action de l’homme dans son propre intérêt et celui d’autrui et de l’univers dont la protection et la sauvegarde lui incombent.

Deuxièmement : L’enracinement de la foi à partir de cette même conception religieuse. Cette foi implique une croyance ferme basée sur la profession de l’unicité de Dieu et la reconnaissance de Sa magnificence et de la suprématie de Sa volonté. Elle induit également l’observance des commandements du Très-Haut dans la gestion des affaires des individus et des communautés, à travers des prescriptions et des prohibitions qui mettent en application la Volonté et la Justice de Dieu. Ainsi, pour que soit illustré le caractère positif de la foi dans son aspect doctrinal et légal, elle doit inévitablement s’accompagner d’un troisième élément incarné par des pratiques comportementales qui ne doivent souffrir ni transgression ni négligence. Ces pratiques ont trait aux bonnes mœurs et aux différents aspects de la vertu. Il s’agit, entre autres, de l’humilité, des sentiments d’amitié, de fraternité et de solidarité envers l’Autre, ainsi que la consécration de l’esprit de tolérance et la lutte contre le fanatisme et la discrimination dans toutes leurs formes et manifestations.

Une telle initiative, somme toute primordiale et fondamentale, est susceptible de permettre au dialogue de réaliser davantage de compréhension, de convivialité et de progression vers la paix. Cette paix, on le sait, doit préalablement être assortie du respect et de la reconnaissance de l’autre tel qu’il est. Elle doit être également précédée de la tolérance par laquelle le Moi s’affirme, comme elle doit s’accompagner d’un minimum de concessions en matière de ce qui est conçu comme étant propriété privée. En définitive, elle doit aller de pair avec la recherche de la convergence à travers les valeurs communes.

En outre, pour que le dialogue atteigne ses objectifs, il doit aller au-delà du simple échange de paroles et d’opinions, qui peut se faire à distance. Plutôt il doit se matérialiser dans des rencontres permettant l’interaction effective et la confrontation des points de vue, même divergents, qui donnent lieu à l’émergence de principes et de valeurs unificateurs.

Conçu ainsi, le dialogue peut se dérouler par étapes et à plusieurs échelles :

1. Entre ceux qui ont pour mission de veiller sur les intérêts des croyants des différentes religions révélées. Cette étape a effectivement été initiée par les rencontres répétées entre Sa Sainteté le Pape et plusieurs chefs d’Etat islamiques. Ce fut le cas lors de sa visite au Maroc, le 19 août 1985, durant laquelle il s’est réuni avec Sa Majesté le Roi Hassan II, qu’Allah ait son âme. A cette même occasion, il a prononcé un discours devant une immense audience rassemblée pour la circonstance au complexe sportif de Casablanca.

2. Entre les théologiens des différentes confessions, en vue de déterminer les points de convergence et d’entente qui sont en fait très nombreux et d’une importance capitale.

3. Entre les générations instruites, par le biais d’inculcation des prescriptions religieuses à vocation unioniste, sans atteinte à aucune des confessions. La position de l’Islam à cet égard est aussi claire qu’irréprochable.

4. Entre les membres de l’ensemble de la communauté des croyants  représentant l’opinion publique, en mettant à contribution les moyens de communication pour répandre l’esprit de tolérance et inciter à la convivialité et à la coexistence dans un climat de sécurité et de paix.

Il est évident que les Livres révélés et les différents éléments du patrimoine qui en découlent sont riches en thèmes susceptibles de constituer une plate-forme de base pour la méditation et le débat et un support substantiel pour le dialogue.

Dans le domaine du dialogue, ces thèmes seront davantage enrichis, une fois traités en confrontation à la réalité concrète de la vie quotidienne, avec ses perturbations, ses contradictions, ses antagonismes et ses problèmes. Cette réalité peut se rapporter soit au quotidien des individus, soit aux grandes questions qui préoccupent l’humanité dans de nombreux coins du globe.

Etant foncièrement croyants et du fait de leur attachement à leur foi et à ses valeurs, les adeptes des religions révélées sont en mesure de faire face aux problèmes du monde contemporain et d’y trouver les solutions adéquates. Ils sont également capables de relever tous les défis. Aussi sont-ils chargés d’une mission humaniste commune dont ils doivent s’acquitter convenablement, dans un monde dominé par l’anarchie occasionnée par la fragilité de la foi dans les esprits et par la prolifération des tendances à l’athéisme et au laïcisme et des courants de l’absurde et de l’indifférence. Au préalable, cette mission impose aux croyants d’inculquer aux nouvelles générations les valeurs divines et, à travers ces valeurs, ils parviennent à prendre conscience du sens de leur existence, de l’essence de leurs êtres et de leur rôle dans l’univers. Ils arriveront également à comprendre comment devrait être leur relation avec Dieu et ce qu’elle leur impose comme obligations.

Quant à la règle du dialogue, elle est représentée par l’équation suivante :

1. Tu dois connaître de l’autre ce que tu veux qu’il connaisse de toi.

2. Tu dois agir avec l’autre de la même manière dont tu veux qu’il agisse avec toi.

L’autre ici est celui qui est d’une confession différente de la tienne.

Entre les gens du Livre, le point de départ du dialogue consiste en la compréhension préalable de la bienveillance qui caractérise ces religions. Cette bienveillance conduit à une tolérance qui incite à enterrer les erreurs du passé et du présent. Erreurs commises pour des raisons conjoncturelles qui sont souvent sans aucun lien avec la religion ou qui sont imputées à celle-ci par une mauvaise interprétation de ses textes ; ce qui s’est traduit par l’imagination de l’existence de problèmes et de dangers illusoires.

Nul doute que derrière de telles chimères se cache l’explication de nombreux conflits qui ont une coloration religieuse et des expressions diversifiées, allant des guerres sanglantes aux conflits de culture et de civilisation.

Si l’on médite sur ces conflits, on sera frappé par la pléthore surprenante d’écrits insidieux qui sont manifestement hostiles à l’islam. Ils sont certes le produit d’une imparfaite compréhension de son essence, mais ils aboutissent à la défiguration de son image et, souvent, à la réalisation de desseins politiques, militaires et économiques ; le but étant de préparer sa perte.

Ainsi, dans la perspective de légitimer ces desseins et de les mettre en application, la plupart de ces écrits tendancieux mettent l’accent sur des phénomènes dont les aspects négatifs sont abusivement rattachés à l’islam. Parmi ces phénomènes, les plus notables sont le fanatisme et le terrorisme, nonobstant ce qui les sous-tend parfois comme facteurs pouvant les ramener à de simples réactions spontanées provoquées par des pratiques malveillantes à l’encontre des musulmans et même des non-musulmans. On en veut pour preuve ce qui se passe dans certains pays européens où l’on assiste à des actes de violence perpétrés par des minorités ou des courants opprimés.

Comme il a été précédemment souligné, le dialogue peut s’établir dans le domaine de la foi en Dieu, de l’observance de Ses commandements et de l’application des valeurs comportementales qui s’en inspirent, afin de pénétrer l’essence de la religion. En effet, ce qui tient lieu de vérité, ou de vérités suprêmes, n’admet nullement d’être controversé, bien que les modalités de l’exprimer puissent être divergentes.

Ainsi, plus les esprits s’attachent fermement à la foi, à la loi divine et aux valeurs, plus ils deviennent capables d’établir le dialogue, de l’approfondir et d’en tirer les meilleurs avantages. Citons-en la possibilité d’assimiler l’identité de l’Autre, sachant que cette assimilation requiert l’effort de se défaire de l’enfermement égoïste et individualiste sur soi.

En revanche, quand l’attachement à la foi est fragile ou nul, cela entrave  le dialogue et donne lieu à l’ignorance et au fanatisme. Il en découle aussi une inconscience totale de la réalité qui se traduit par des erreurs qui peuvent être irréparables voire fatales.

Conçu dans sa meilleure expression, le dialogue devra aboutir à un échange interactif. Il s’agit de s’enrichir au contact de l’Autre après avoir accepté d’en être différent. Autrement, il est plus judicieux de s’en éloigner et de ne pas s’immiscer dans ses affaires ni le provoquer et encore moins de l’attaquer ou d’entrer en conflit avec lui.

Le dialogue que cherchent à établir certains pays du Machreq (Orient), dont les populations se constituent en musulmans et de chrétiens, quand bien même celles-ci sont minoritaires, est de nature toute particulière. Il diffère nettement du dialogue susceptible de se maintenir dans un pays comme le Maroc dont la population est entièrement de confession musulmane, les chrétiens y sont absents et les juifs y constituent une minorité. Dans le premier cas, le dialogue a pour objectif la cohabitation dans un contexte de pluralité religieuse régissant la même communauté et gouvernant ses institutions qui vont de l’enseignement dans les écoles au pouvoir et ses instruments. Dans le second cas, le dialogue est appelé à créer les opportunités favorisant davantage la communication qui vise à jeter les ponts de la compréhension mutuelle et à consolider les liens de la connaissance mutuelle.

Le dialogue dans le Saint-Coran :

Le Saint-Coran a toujours été un Livre de dialogue ouvert dont les portées et les horizons sont infinis. Ce dialogue y a été entretenu avec différentes catégories de créatures du Très-Haut, dont les croyants, les associationistes, les hypocrites, les gens du Livre et d’autres, notamment les Anges, les Prophètes et même Iblis (Satan). Les procédés méthodologiques et les modalités de la mise en œuvre de ce dialogue y sont bien explicités. C’est à ces questions qu’est dévolue la présente section qui s’articule comme suit :

1. Termes et vocables signifiant le dialogue.

2. Modalités et procédés du dialogue.

3. Exemples du dialogue.

Termes et vocables signifiant le dialogue :

Nous présentons, ci-après, les termes et les vocables les plus marquants qui signifient la notion de dialogue :

1. At-tahâwur (le dialogue) : c’est l’échange verbal à caractère interactif entre les interlocuteurs. Ce mot est un nom d’action dérivé du verbe « hâra, yahûru » qui signifie « retourner ». Ce verbe est mentionné dans le Saint Coran, dans le verset qui évoque « celui qui recevra son livre derrière son dos », lequel « pensait que jamais il ne ressusciterait »(4).

Le dialogue implique l’interaction de deux parties entretenant un échange verbal : un locuteur et un allocutaire, ou un émetteur et un récepteur. Le but est de parvenir par le biais de cet échange à une opinion commune ou à une conclusion partagée assise sur des préalables et principes acceptés des deux parties. Ceci étant, le dialogue ne peut se maintenir et se poursuivre que si l’un des interlocuteurs est d’accord avec l’autre et le suit dans la progression et les conclusions de son raisonnement. Toutefois, dès lors que la conversation se transforme en affrontement, en opposition ou en controverse, les deux parties se trouvent en situation de polémique (jadal). Dieu le Très-Haut a dit :

* « Et il avait des fruits et dit alors à son compagnon avec qui il conversait : ‘je possède plus de biens que toi, et je suis plus puissant que toi grâce à mon clan’ »(5).

Le Très-Haut a dit également :

* « Son compagnon lui dit, tout en conversant avec lui : ‘Serais-tu mécréant envers celui qui t’a créé de terre, puis de sperme et enfin t’a façonné en homme ?’ »(6).

* « Allah a bien entendu la parole de celle qui discutait avec toi à propos de son époux et se plaignait à Allah. Et Allah entendait votre conversation, car Allah est Audient et Clairvoyant »(7).

2. Al-Jadal, al-Jidâl, al-mujâdala : notions qui signifient la dialectique, la discussion, le débat, la polémique et la controverse. Elles impliquent une conversation fondée sur la capacité d’argumentation et visent essentiellement la persuasion par la preuve, pour parvenir à édifier celui qui est incapable de percer l’essence d’une chose. Il s’agit là aussi de confrontation d’arguments et de dialectique pour convaincre l’allocutaire et rectifier ses informations.

Prise dans cette acception, la discussion pourrait éventuellement s’accompagner de différend et de querelle en ce sens que la partie antagoniste y est pleinement engagée.

Pour l’essentiel, la dialectique tire son origine du dialogue. Ainsi, pour Platon, le dialecticien ou le polémiste est « celui qui a une bonne maîtrise de la question et de la réponse ». Et c’est là une parfaite définition du dialogue. Dans le même paradigme sémantique, on parle aussi de l’éristique (al-jidâl) qui se définit comme l’art de la controverse, bien que son acception, comme nous le verrons plus loin, se rapproche davantage de la dispute, de la contradiction et de la querelle. La notion de polémique (al-mujâdala) qui figure dans le Saint Coran comme titre de la sourate 58, exprime plutôt la réciprocité dans la controverse. Sur le plan lexical, tous ces termes dérivent du verbe « jadala »  qui veut dire « se disputer, se quereller avec, prendre à partie, être en litige avec.. ». Le terme « al-jadal » dans le sens de dissidence et d’antagonisme d’opinions qui peuvent parfois conduire à un conflit ou à une dispute d’envergure. C’est ce qui est notamment mentionné dans deux nobles versets coraniques où Dieu le Très-Haut a dit respectivement :

* « L’homme cependant, est de tous les êtres le plus grand disputeur »(8); et

* « Ton peuple s’en détourne, en disant : ‘Nos dieux sont-ils meilleurs, ou bien lui ?’ Ce n’est que par polémique qu’ils te le citent comme exemple. Ce sont plutôt des gens chicaniers »(9).

Quant aux deux notions de « jidâl » (éristique) et « mujâdala » (polémique), elles admettent la même acception sémantique qui peut couvrir l’idée de la défense de la vérité (al-haqq) ou la tentative d’imposer le faux (al-bâtil). Or quand la polémique a comme dessein d’asseoir le faux, elle prend un caractère négatif en ce qu’elle n’engendre que la dissension et la querelle. C’est le cas des mécréants qui s’employaient à combattre la vérité en exigeant des miracles et en pressant le châtiment pour prendre en dérision les Signes d’Allah. C’est ce qui ressort du propos du Tout-puissant qui a dit :

* « Et ceux qui ont mécru disputent avec de faux arguments, afin d’infirmer la vérité et prennent en raillerie Mes versets (le Coran) ainsi que ce (châtiment) dont on les a avertis »(10).

Le Saint-Coran ne mentionne que deux occurrences du mot « al-jidâl » (au sens de « dispute »), et ce, respectivement dans les deux versets suivants :

* « Le pèlerinage a lieu dans des mois connus. Si l’on se décide de l’accomplir, alors point de rapport sexuel, point de perversité, point de dispute pendant le pèlerinage »(11).

* « Ils dirent : Ô Noé tu as disputé avec nous et multiplié les discussions. Apporte-nous donc ce dont tu nous menaces, si tu es du nombre des véridiques ».(12)

Cependant, le Saint Coran fait mention du verbe « jâdala » (discuter, controverser, polémiquer, tergiverser), conjugué aux formes de l’accompli (mâdî), l’inaccompli (mudâri’) et l’injonctif (‘amr), et ce dans vingt-cinq versets. Parmi ces derniers, à titre d’exemple, celui mentionné plus haut où Nohé est interpellé. Le verbe en cause est à la forme accomplie. Signalons également l’ouverture de la sourate « Al-Mujâdala » (La discussion) évoquée précédemment et où le même verbe est à la forme de l’inaccompli. En outre, le verbe dans sa forme injonctive figure dans le verset où le Très-Haut dit :

* « Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon. Car c’est ton Seigneur qui connaît le mieux celui qui s’égare de Son sentier et c’est Lui qui connaît le mieux ceux qui sont bien guidés »(13).

3. Al-mirâ’  et ses dérivés signifient : la dispute, la querelle ou la contradiction. Il s’agit de manifester son désaccord à l’égard des assertions du locutaire. En arabe, l’origine de ce terme vient du verbe marâ, qu’on reconnaît dans l’expression « mary an-nâqata », et qui veut dire : « presser le pis de la chamelle pour qu’elle donne du lait ». Dans le contexte qui nous concerne ici, l’emploi est métaphorique, en ce sens qu’il s’agit en effet d’une tentative de la part de chacun des deux interlocuteurs de « presser » son partenaire pour qu’il extériorise le maximum de ses arguments.

Le terme est mentionné dans le Saint Coran à travers deux contextes :

Dans le premier contexte,  le nom « al-mirâ’ » (la dispute, la querelle, la contradiction) et son verbe dérivé dans ses trois formes, accomplie, inaccomplie et injonctive, est employé dans le sens de la polémique acharnée et de la controverse opiniâtre, et ce dans quatre versets dont celui où le Très-Haut a dit, en s’adressant à Son Envoyé (Prière et Salut sur Lui) :

* « Ne discute à leur sujet que d’une façon apparente et ne consulte personne en ce qui les concerne »(14).

Il est probable que l’injonction adressée au Prophète (Sur Lui la Prière et le Salut) de ne tergiverser avec ses interlocuteurs parmi les gens du Livre qu’en apparence, n’est qu’une manière d’abonder dans le sens de leur attitude, puisque la querelle et la dispute recèlent la dimension la plus blâmable de la controverse.

Dans le second contexte, les contradicteurs (dits al-mumtarûn) et leurs actes sont mentionnés, sous toutes les formulations, dans onze versets. Tous les usages du mot et de ses dérivés signifient l’hésitation, le scepticisme voire la dénégation et le désaveu. Ainsi, Dieu le Très-Haut a dit dans l’un de ces versets :

* « Il sera un signe au sujet de l’Heure. N’en doutez point. Et suivez-moi : voilà un droit chemin »(15).

Le Très-Puissant a dit également :

* « La vérité vient de ton Seigneur. Ne sois donc pas de ceux qui doutent »(16).

A ce second contexte on peut ajouter la mention, dans cinq autres versets, du terme « mirya », dans le sens de « doute » et de « soupçon ». Ainsi, Dieu le Très-Haut a dit dans l’un de ces versets :

* « Ne sois donc pas en doute au sujet de ceci (le Coran). Oui, c’est la vérité venant de ton Seigneur; mais la plupart des gens n’y croient pas »(17).

A la lumière des ces données tirées du Saint Coran, les savants de l’Islam (al-‘ulamâ’) ont traité de l’ensemble des niveaux de la conversation visant la controverse et la joute oratoire. Ils ont amplement disserté sur les bienséances en privilégiant le dialogue et en rejetant la dispute et la querelle. En outre, ils manifestaient une certaine réserve quant à la polémique quand elle n’est pas usitée pour établir la vérité et abolir le faux. Ce faisant, ils ne recherchaient nul autre but et surtout pas l’importunité, l’ostentation, l’arrogance, l’exhibition des honneurs ou autres travers. Agissant de la sorte, ils prennent pour référence édifiante la guidance de l’Envoyé de Dieu (Prière et salut sur Lui) Qui a dit :

* « Nulle communauté ne sombrerait dans l’errance après s’être mise dans la bonne voie sans qu’elle cède à la polémique”(18).

Le Prophète (P.S.L.) a dit également :

* « Celui qui requiert la science pour rivaliser avec les ‘ulamâ’ (savants), pour se quereller avec les sots ou se pavaner devant les gens, Allah le mettra en Enfer »(19).

Il est à souligner que, dans le contexte de la science et de l’argumentation par des preuves persuasives, les expressions signifiant l’interrogation sont évoquées à maintes reprises à travers le texte du Saint-Coran. Ainsi, la sourate de la Vache (Al-Baqara), à elle seule, compte sept versets où la question porte sur les croissants de lune, le mois sacré, le vin, les orphelins, les menstruations et sur ce qui est dépensé par deux fois. A titre d’illustration, voici un de ces versets où Allah s’adresse à Son Auguste Prophète dans ces termes :

* « Ils t’interrogent sur les nouvelles lunes –Dis : ‘Elles servent aux gens pour compter le temps, et aussi pour le Hajj [pèlerinage]’ »(20).

Dans d’autres sourates, l’interrogation porte sur les butins (al-‘anfâl), sur l’âme, sur Dhû l-Qarnayn (l’homme aux deux cornes ou aux deux siècles), sur les montagnes et aussi sur l’Heure(21) évoquée dans plusieurs versets dont celui où le Très-Haut a dit :

* « Ils t’interrogent sur l’Heure : ‘Quand arrivera-t-elle ?’ Dis : ‘Seul mon Seigneur en a connaissance. Lui seul la manifestera en son temps. Lourde elle sera dans les cieux et (sur) la terre et elle ne viendra à vous que soudainement.’ Ils t’interrogent comme si tu en étais averti. Dis : ‘Seul Allah en a connaissance.’ Mais beaucoup de gens ne savent pas »(22).

Il est à noter que, dans le Saint-Coran, l’interrogation concerne diverses instances. Nous nous limitons ici à en citer les occurrences qui ont trait aux croyants, aux gens du Livre et aux polythéistes (mécréants) :

1. Pour ce qui est des croyants, afin qu’ils n’abusent pas des questions adressées au Prophète (Paix et salut sur Lui) avant la révélation, Dieu le Très-Haut a dit :

* « Ô croyants ! Ne posez pas de questions sur des choses qui, si elles vous étaient divulguées, vous mécontenteraient. Et si vous posez des questions à leur sujet, pendant que le Coran est révélé, elles vous seront divulguées. Allah vous a pardonné cela. Et Allah est Pardonneur et Indulgent »(23).

2. Pour ce qui est des gens du Livre, Dieu le Tout-Puissant a dit :

* « Les gens du Livre te demandent de leur faire descendre du ciel un Livre. Ils ont déjà demandé à Moïse quelque chose de bien plus grave quand ils dirent : ‘Fais-nous voir Allah à découvert !’ Alors la foudre les frappa pour leur tort »(24).

3. Quant aux mécréants, Dieu le Très-Haut a dit à leur sujet  :

* « Si tu leur demandes : Qui a créé les cieux et la terre, et assujetti le soleil et la lune ?, ils diront très certainement : ‘Allah’. Comment se fait-il qu’ensuite ils se détournent (du chemin droit) ? »(25).

* « Si tu leur demandes : ‘Qui a fait descendre du ciel une eau avec laquelle Il fit revivre la terre après la mort ?’, ils diront très certainement : ‘Allah’. Dis: ‘Louange à Allah !’  Mais la plupart d’entre eux ne raisonnent pas »(26).

Dieu le Très-Haut a dit également à leur propos :

* « Si tu leur demandes : ‘Qui a créé les cieux et la terre ?’, ils diront  certes : ‘Allah’ »(27).

* « Et si tu leur demandes qui les a créés, ils diront très certainement : ‘Allah’. Comment se fait-il donc qu’ils se détournent? »(28).

La méthodologie du dialogue :

Le dialogue a sa méthodologie propre. Pour l’essentiel, elle peut être ramenée à trois points :

* Premièrement : le point de départ dans l’établissement du dialogue avec l’autre consiste à reconnaître celui-ci et à le respecter. Ceci implique de l’accepter tel qu’il est. Autrement dit, admettre qu’on soit différent de lui. Au regard de l’islam, la différence est l’un des Signes du Dieu qui manifestent Sa volonté, Son omnipotence et Sa sagesse. Dieu le Très-Haut a dit :

* « Et parmi Ses signes la création des cieux et de la terre et la variété de vos idiomes et de vos couleurs. Il y a en cela des preuves pour des gens qui entendent »(29).

Il a dit également -Qu’Il soit exalté- :

* « A chacun de vous Nous avons assigné une législation et un plan à suivre. Si Allah avait voulu, certes Il aurait fait de vous tous une seule communauté. Mais Il veut vous éprouver en ce qu’Il vous donne »(30).

La question de la différence va même jusqu’à toucher la confession religieuse; comme il ressort de ce propos du Très-Puissant :

* « A vous votre religion, et à moi ma religion »(31).

Toutefois, cette différence ne doit nullement amener les parties différentes à oublier qu’elles sont créées d’un seul être, comme cela est bien dit à l’ouverture de la sourate An-Nisâ’ (Les Femmes) et dans d’autres. De même que leur différence ne devra pas leur faire oublier qu’Allah a honoré l’être humain pour ce qu’il est. « Certes Nous avons honoré les fils d’Adam »(32), a dit  Dieu le Très-Haut à cet égard. Etant différents, ils ne doivent pas non plus omettre ce qui leur incombe comme obligation de se connaître mutuellement et de s’entraider pour le bien. A ce propos, Dieu le Très-Haut a dit :

* « Entraidez-vous dans l’accomplissement des bonnes œuvres et de la piété et ne vous entraidez pas dans le péché et la transgression »(33).

Il a dit également -Qu’Il soit exalté- :

* « Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous connaissiez. Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allah, est le plus pieux”(34).

Pour rendre possible cette coopération et cette connaissance mutuelle, le Saint-Coran a incité à la reconnaissance et au respect de l’Autre. Ainsi, Dieu le Très-Haut a dit :

* « Il y a certes parmi les gens du Livre qui croient en Allah et en ce qu’on a fait descendre vers vous et en ce qu’on a fait descendre vers eux. Ils sont humbles envers Allah, et ne vendent point les versets d’Allah à vil prix. Voilà ceux dont la récompense est auprès de leur Seigneur »(35).

A propos des gens du Livre, Dieu le Très-Puissant a également dit :

* « Mais ceux d’entre eux qui sont enracinés dans la connaissance, ainsi que les croyants, (tous) ont foi à ce qu’on a fait descendre sur toi et à ce qu’on a fait descendre avant toi. Et quant à ceux qui accomplissent la Salât, paient la Zakât et croient en Allah et au jour dernier, ceux-là Nous leur donnerons une énorme récompense »(36).

Il dit aussi -Gloire à Lui – :

* « Tu trouveras certainement que les Juifs et les associateurs sont les ennemis les plus acharnés des croyants. Et tu trouveras certes que les plus disposés à aimer les croyants sont ceux qui disent : ‘Nous sommes chrétiens.’ C’est qu’il y a parmi eux des prêtres et des moines, et qu’ils ne s’enflent pas d’orgueil. Et quand ils entendent ce qui a été descendu sur le Messager [Muhammad], tu vois leurs yeux déborder de larmes, parce qu’ils ont reconnu la vérité. Ils dirent : ‘Ô notre Seigneur ! Nous croyons : inscris-nous donc parmi ceux qui témoignent (de la véracité du Coran)’ »(37).

Le respect de l’autre partie du dialogue signifie également le fait de ne pas la railler et de ne pas la calomnier. Dieu le Très-Haut a dit :

* « Ô vous qui avez cru ! Qu’un groupe ne se raille pas d’un autre groupe : ceux-ci sont peut-être meilleurs qu’eux. Et que des femmes ne se raillent pas d’autres femmes : celles-ci sont peut-être meilleures qu’elles. Ne vous dénigrez pas et ne vous lancez pas mutuellement des sobriquets (injurieux) »(38).

Il a dit également -Gloire à Lui !- :

* « Allah n’aime pas qu’on profère de mauvaises paroles sauf quand on a été injustement provoqué »(39).

Cette attitude est recommandée même à l’égard de celui avec qui on diverge sur le plan religieux, conformément au propos du Très-Haut :

* « N’injuriez pas ceux qu’ils invoquent, en dehors d’Allah, car par agressivité, ils injurieraient Allah, dans leur ignorance »(40).

Il va sans dire qu’un tel comportement, qui impose l’estime et la considération de l’interlocuteur, requiert l’échange et l’égalité dans le traitement. Il exige également un accord sur une base commune de départ et qui constitue le seuil minimal pour atteindre l’objectif escompté du dialogue. A ce propos, Dieu le Très-Haut a dit:

* « Dis : ‘Ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous : que nous n’adorions qu’Allah, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors d’Allah’ »(41).

Deuxièmement : l’instrument premier et fondamental du dialogue est la connaissance infaillible dont le détenteur est convaincu et animé par le désir de la communiquer et d’en convaincre les autres. Le Saint-Coran a évoqué cette connaissance à travers la mention de la science, de la sagesse et de la clairvoyance. Aussi, Dieu le Très-Haut a-t-il dit :

* « Dis : ‘Voici ma voie, j’appelle les gens [à la religion] d’Allah, moi et ceux qui me suivent’ »(42).

Dieu le Très-Puissant a dit également :

* « Et ne poursuis pas ce dont tu n’as aucune connaissance. L’ouïe, la vue et le cœur : sur tout cela, en vérité, on sera interrogé »(43).

Il a dit également -Louange à Lui- :

* « Et quand Jésus apporta les preuves, il dit : « Je suis venu à vous avec la sagesse et pour expliquer certains de vos sujets de désaccord »(44).

Le Saint Coran a condamné celui qui converse ou polémique sans connaissance sincère et persuasive. Ainsi, Dieu le Très-Haut a dit :

* « Et parmi les gens, il y en a qui se disputent à propos d’Allah, sans science, ni guidée, ni Livre éclairant »(45).

Dieu le Très-Puissant a également dit, en commandant à Son Envoyé de chercher en Dieu un refuge pour faire face à la polémique fallacieuse provenant des ignorants qui n’ont ni preuve ni argument :

* « Ceux qui discutent sur les versets d’Allah sans qu’aucune preuve ne leur soit venue, n’ont dans leurs poitrines qu’orgueil. Ils n’atteindront pas leur but. Implore donc la protection d’Allah, car c’est Lui l’Audient, le Clairvoyant »(46).

En incitant au recours à l’argument de la science en matière de dialogue, le Saint Coran enseigne comment se fonder sur cette argumentation. Il s’agit de confronter la preuve à une autre preuve et procéder de manière progressive en l’exposant dans ses aspects les plus concrets, afin de parvenir à la persuasion. Ainsi, le Saint Coran s’est-il adressé aux gens du Nord dans ces termes :

* « C’est Nous qui vous avons créés. Pourquoi ne croiriez-vous donc pas [à la résurrection] ? Voyez-vous ce que vous éjaculez : est-ce vous qui le créez ou [en] sommes-Nous le Créateur ? Nous avons prédéterminé la mort parmi vous. Nous ne serons point empêchés de vous remplacer par vos semblables, et vous faire renaître dans [un état] que vous ne savez pas. Vous avez connu la première réaction. Ne vous rappelez-vous donc pas ? Voyez-vous donc ce que vous labourez ? Est-ce vous qui le cultivez ? ou [en] sommes-Nous le cultivateur ? Si Nous voulions Nous le réduirions en débris. Et vous ne cesseriez pas de vous étonner et [crier] : ‘Nous voilà endettés ! ou plutôt, exposés aux privations’. Voyez-vous donc l’eau que vous buvez ? Est-ce vous qui l’avez fait descendre du nuage ? ou [en] sommes Nous le descendeur ? Si Nous voulions, Nous la rendrions salée. Pourquoi n’êtes-vous donc pas reconnaissants ? Voyez-vous donc le feu que vous obtenez par frottement ? Est-ce vous qui avez créé son arbre ou [en] sommes-Nous le Créateur ? Nous en avons fait un rappel (de l’Enfer), et un élément utile pour ceux qui en ont besoin. Glorifie donc le nom de ton Seigneur, le Très Grand ! »(47).

Le Coran a ainsi commencé par des arguments à propos de la possibilité de la résurrection, en avançant comme preuve la régénération des créatures à laquelle ils ne croyaient pas, bien qu’elle soit identique à la création première à laquelle ils croyaient. En outre, par procédé interrogatif, il a souligné que les deux créatures sont semblables et que Dieu a la capacité d’un tel acte alors qu’eux, ils en sont incapables. De même que Dieu le Très-Haut a le pouvoir de ressusciter Ses créatures autant qu’Il a celui de les faire mourir, et rien ne peut L’en empêcher ni Le vaincre. Certes, s’Il le voulait, Il aurait engendré une seconde fois la même créature ou en créer une autre. Le Coran poursuit le raisonnement graduel en leur rappelant la première création pour qu’ils la comparent à la seconde. Il avance ensuite un autre élément d’argumentation en faveur de la puissance d’Allah. Ainsi, après avoir évoqué la création de la progéniture, il a parlé de la germination des cultures en rappelant la possibilité de les détruire et de les anéantir en les privant d’en tirer profit. Par la suite, il les questionne sur l’eau qui est la source de toute vie et sur qui en commande la descente du ciel et qui en dispose. Il leur rappelle aussi sa faveur en la leur prodiguant, sachant que s’Il le voulait, Il l’aurait rendue non potable. Au terme de cette argumentation, Son interrogation a porté sur le feu qui leur procure divers avantages et qui leur rappelle le feu de la Géhenne. C’est Dieu en effet qui en est le Créateur.

C’est ainsi que ces versets du Saint Coran ont passé en revue une panoplie de bienfaits qui témoignent de la grandeur et de l’omnipotence d’Allah.

Nul besoin alors de démontrer à quel point toutes ces modalités argumentatives reposent sur la démonstration qui constitue le raisonnement analogique impliquant la certitude et la preuve incontestable qui convainc l’adversaire. Cette preuve peut être de nature rationnelle déductible de principes élémentaires et de préalables logiques qui la sous-tendent. Elle peut être aussi de nature empirique fondée sur la réalité concrète et palpable. C’est le cas lorsque Abraham (Prière et salut sur lui) a demandé à Allah, le Transcendant et l’Exalté, de lui montrer comment Il ressuscite les morts :

* « Et quand Abraham dit : ‘Seigneur ! Montre-moi comment Tu ressuscites les morts’. Allah dit : ‘Ne crois-tu pas encore ?’ « Si ! dit Abraham ; mais que mon cœur soit rassuré’. ‘Prends donc, dit Allah, quatre oiseaux, apprivoise-les (et coupe-les) puis, sur des monts séparés, mets-en un fragment ensuite appelle-les : ils viendront à toi en toute hâte. Et sache qu’Allah est Puissant et Sage’ »(48).

Nous reviendrons à ce noble verset lorsque nous traiterons, plus loin, des types de dialogue.

Le Saint Coran s’est exprimé en usant de tous les types de discours et a mis à contribution toutes sortes de preuves et d’arguments. Certains de ces éléments de persuasion se conforment à la nature de la mentalité arabe, en étant assortis de clarté des préambules et des conclusions, tandis que d’autres prennent la forme conventionnelle propre aux théologiens dialectiques (Mutakallimuûn) consistant en l’argumentation fondée sur les preuves minutieuses et complexes. C’est un style qui met en œuvre une dynamique intellectuelle dans laquelle la pensée se surpasse pour traiter avec l’adversaire ou pour le contredire.

Dans le Saint Coran, le mot « Hujjah » (argument, preuve) et ce qui s’y rapporte est mentionné vingt fois. En voici deux versets à titre d’illustration :

Dieu le Très-Haut a dit :

* « Appelle donc (les gens) à cela [à la foi] ; reste droit comme il t’a été commandé ; ne suis pas leurs passions ; et dis : ‘Je crois en tout ce qu’Allah a fait descendre comme Livre, et il m’a été commandé d’être équitable entre vous. Allah est notre Seigneur et votre Seigneur. A nous nos œuvres et à vous vos œuvres. Aucun argument [ne peut trancher] entre nous et vous. Allah nous regroupera tous. Et vers Lui est la destination. Et ceux qui discutent au sujet d’Allah, après qu’il a été répondu à [Son appel], leur argumentation est auprès d’Allah sans valeur. Une colère tombera sur eux et ils auront un dur châtiment »(49).

Quant au vocable « al-burhân » (démonstration, argumentation, preuve, raisonnement), il est mentionné dans huit versets, dont les deux suivants, à titre d’exemple :

Dieu le Très-Haut a dit :

* « Ô gens ! Certes une preuve évidente vous est venue de la part de votre Seigneur. Et Nous avons fait descendre vers vous une lumière éclatante »(50).

Il a dit également -Gloire à Lui !- :

* « Et ils ont dit : ‘Nul n’entrera au Paradis que Juifs ou Chrétiens.’ Voilà leurs chimères. Dis : ‘Donnez votre preuve, si vous êtes véridiques »(51).

Il est à signaler que cette expression dissuasive : « Donnez votre preuve ! » est employée dans trois autres versets relevant, respectivement, des sourates Al-Anbiyâ’ (Les Prophètes, verset 24), An-Naml (Les Fourmis, verset 64) et Al-Qaçaç (Le Récit, verset 75).

Par ailleurs, en exhortant à la nécessité de fonder le dialogue sur la parole véridique soutenu par des preuves, il initie les croyants aux modalités d’arbitrage en cas de litige. Ainsi en est-il du propos du Très-Haut qui a dit :

* « Ô croyants ! Obéissez à Allah, et obéissez au Messager et à ceux d’entre vous qui détiennent le commandement. Puis, si vous disputez en quoi que ce soit, renvoyez-le à Allah et au Messager, si vous croyez en Allah et au Jour dernier. Ce sera bien mieux et de meilleure interprétation (et aboutissement) »(52).

En outre, le Saint Coran invite les non musulmans à recourir à la juridiction de leurs Livres révélés, comme cela a été le cas quand le Prophète Mohammad (Prière et Bénédiction sur Lui) qui a renvoyé les Banî Israël (les enfants d’Israël) à la Thora (Tawrât) afin qu’ils s’assurent que c’était à cause de leur iniquité qu’Allah leur avait prohibé certaines variétés d’aliments; alors qu’auparavant, celles-ci étaient toutes licites, hormis ce que Jacob (Ya’qûb) s’était interdit comme viande et lait de chameau :

* « Toute nourriture était licite aux enfants d’Israël sauf celle qu’Israël lui-même s’interdit avant que ne descendit la Thora. Dis-[leur] : ‘Apportez la Thora et lisez-la, si ce que vous dites est vrai !’ »(53).

Lorsqu’ils furent confondus et réduits au silence par cet argument, ils n’osèrent pas se référer à la Thora. Aussi se sentirent-ils humiliés et honteux et furent considérés comme étant menteurs et iniques. C’est en effet ce qui ressort du verset consécutif au précédent :

* « Donc, quiconque, après cela, invente des mensonges contre Allah… ceux-là sont, donc, les vrais injustes ».

Une histoire analogue est celle d’Abraham (Ibrâhim) contre qui Nemrûd argumentait au sujet de l’existence d’Allah et prétendait comme Lui (Qu’Il soit exalté), être capable de donner la vie et la mort. Cependant, lorsqu’il lui demanda de faire venir le soleil du Couchant, comme Allah le fait venir du Levant, le protagoniste resta coi et ne put répondre. Ainsi Dieu le Très-Haut a dit : « Le mécréant resta alors confondu »(54).

Troisièmement : la manière la plus efficace en matière de dialogue consiste à l’entreprendre avec une souplesse doublée d’aménité, de discipline, de patience, de magnanimité, de calme, de conseil, d’indulgence et de bon sens. Ce faisant, il faut éviter l’excès, l’obstination, l’agressivité, le fanatisme, l’intransigeance, l’affectation, l’insolence et l’arrogance. Les exemples illustrant cette attitude sont nombreux dans le Saint-Coran. On peut en citer le cas d’Abraham qui s’entretenait avec son père qu’il essayait de persuader de professer l’unicité d’Allah : Dieu le Très-Haut a dit :

* « Et mentionne dans le Livre, Abraham. C’était un très véridique et un Prophète. Lorsqu’il dit à son père : ‘Ô mon père, pourquoi adores-tu ce qui n’entend ni ne voit, et ne te profite en rien ? Ô mon père, il m’est venu de la science ce que tu n’as pas reçu ; suis-moi, donc, je te guiderai sur une voie droite. Ô mon père, n’adore pas le Diable, car le Diable désobéit au Tout Miséricordieux. Ô mon père, je crains qu’un châtiment venant du Tout Miséricordieux ne te touche et que tu deviennes un allié du Diable’. Il dit : ‘Ô Abraham, aurais-tu du dédain pour mes divinités ? Si tu ne cesses pas, certes je te lapiderai, éloigne-toi de moi pour bien longtemps’. ‘Paix sur toi’, dit Abraham. ‘J’implorerai mon Seigneur de te pardonner car Il m’a toujours comblé de Ses bienfaits. Je me sépare de vous, ainsi que de ce que vous invoquez, en dehors d’Allah, et j’invoquerai mon Seigneur. J’espère ne pas être malheureux dans mon appel à mon Seigneur’ »(55).

Abraham a ainsi employé l’expression « ‘aba-ti » (mon père) pour s’adresser à son père, et c’est une formule de la langue arabe où la particule génitive de la première personne (-î), qu’on a dans « ‘ab-î » (mon père) est remplacée par son allophone « -ti » qui n’est usité que pour interpeller le père et la mère. Elle peut être d’inclinaison oblique (kasr) (-ti) ou accusative (fath) (ta) et dans ce dernier cas, la voyelle peut être allongée (-tâ). Son emploi recèle une charge d’amour filial et de bienveillance; ce qui est plus approprié au sermon. Cette sollicitude est d’autant plus amplifiée qu’elle s’exprime dans les versets par une redondance d’expressions vocatives, quatre fois répétées. A cela s’ajoute l’étonnante patience d’Abraham face à l’agressivité de son père qui le menaçait de lapidation et d‘abandon, alors que lui, il répondait à la menace par un adieu courtois assorti d’invocation de pardon divin pour son père.

Cette attitude d’Abraham en s’évertuant à convaincre son père et à le remettre sur le droit chemin n’est pas étonnante, surtout que sa personnalité était foncièrement caractérisée par la mansuétude, la sérénité et l’imploration de Dieu Qui est son ultime recours. Il observait cette éthique dans toutes les étapes de sa vie et dans ses relations avec tout le monde. C’est le cas avec son père, comme on vient de le voir, et aussi avec les gens dont le comportement l’avait contraint à les abandonner ainsi que ce qu’ils adoraient. C’est pour cela que Dieu le Très-Puissant en a parlé dans le Saint-Coran en ces termes élogieux :

* « Abraham était certes plein de sollicitude et indulgent »(56).

* « Abraham était, certes, longanime, très implorant et repentant »(57).

Pour montrer que la souplesse et la sérénité, au lieu de la grossièreté et la violence, constituent la principale qualité requise chez celui qui veut entreprendre le dialogue, le Saint-Coran a mis l’accent sur cette vertu en maintes circonstances. Ainsi en est-il, par exemple, du cas de Moïse (Prière et Paix sur Lui) quand Allah lui avait commandé d’aller, en compagnie de son frère, pour dialoguer avec Pharaon, en leur recommandant de s’y prendre avec cette même démarche conciliante, alors qu’ils redoutaient la puissance et la tyrannie de leur protagoniste. Dieu le Très-Haut a dit :

* « Pars, toi et ton frère, avec Mes prodiges; et ne négligez pas de M’invoquer. Allez vers Pharaon : il s’est vraiment rebellé. Puis, parlez-lui gentiment. Peut-être se rappellera-t-il ou [Me] craindra-t-il ? Ils dirent : ‘Ô notre Seigneur, nous craignons qu’il nous maltraite indûment, ou qu’il dépasse les limites’. Il dit : ‘Ne craignez rien. Je suis avec vous : J’entends et Je vois. Allez donc chez lui ; puis, dites-lui : ‘Nous sommes tous deux, les messagers de ton Seigneur. Envoie donc les enfants d’Israël en notre compagnie et ne les châtie plus. Nous sommes venus à toi avec une preuve de la part de ton Seigneur. Et que la paix soit sur quiconque suit le droit chemin ! Il nous a été révélé que le châtiment est pour celui qui refuse d’avoir foi et qui tourne le dos’ »(58).

Ainsi Moïse avait-il poursuivi le dialogue, en évoquant le Seigneur et les générations anciennes, pour aboutir à la séquence de la joute avec les magiciens, comme cela est étayé par les versets subséquents.

Telle était la manière des Envoyés et des Prophètes dans le dialogue avec leurs peuples. Ils s’intégraient à leur communauté dans un esprit de fraternité qui suscitait la confiance, l’assurance et la disposition à l’écoute et à la persuasion. Ainsi, parlant de Hûd, de Sâlih, de Chu’aïb et de Madian, Dieu le Très-Haut a dit, respectivement :

* « Et (Nous avons envoyé) aux ‘Âd, leur frère Hûd »(59).

* « Et aux Thamûd, leur frère Sâlih »(60).

* « Et aux Madyan, leur frère Chu’aïb »(61).

Cette fraternité dont parle le Saint Coran a toujours été accompagnée de conseil. Ainsi, Noé a dit à son peuple:

* « Et mon conseil ne vous profiterait pas, au cas où je voulais vous conseiller et qu’Allah veuille vous égarer »(62).

Par ailleurs, Allah le Très-Puissant a complimenté Sidnâ Mohammad (Prière et Paix sur Lui) pour ses grandes qualités d’affabilité et de magnanimité et pour son éloignement de la grossièreté et de la brutalité; des vertus qui avaient pour effet de rassembler les gens autour de Lui. Aussi, s’adressant à Lui, Dieu le Très-Haut a-t-il dit :

* « C’est par quelque miséricorde de la part d’Allah que tu (Muhammad) as été si doux envers eux ! Mais si tu étais rude, au cœur dur, ils se seraient enfuis de ton entourage. Pardonne-leur donc, et implore pour eux le pardon (d’Allah). Et consulte-les à propos des affaires »(63).

Compte tenu de l’importance que ces vertus et autres représentent en matière de dialogue et de ce qui s’y rapporte comme formes de tractation avec les gens, le Saint Coran a insisté, dans nombre de ses versets, sur la nécessité d’en faire une règle de conduite. Ainsi, le Très-Haut a dit :

* « Nous avons pris l’engagement des enfants d’Israël […] d’avoir de bonnes paroles avec les gens »(64).

* « Et quand vous parlez, soyez équitables, même s’il s’agit d’un proche parent »(65).

* « Accepte ce que l’on t’offre de raisonnable, commande ce qui est convenable et éloigne-toi des ignorants »(66).

* « La bonne action et la mauvaise ne sont pas pareilles. Repousse (le mal) par ce qui est meilleur; et voilà que celui avec qui tu avais une animosité devient tel un ami chaleureux. Mais (ce privilège) n’est donné qu’à ceux qui endurent et il n’est donné qu’au possesseur d’une grâce infinie »(67).

* « Et nous avons désigné parmi eux des dirigeants qui guidaient (les gens) par Notre ordre aussi longtemps qu’ils enduraient et croyaient fermement en Nos versets »(68).

Le noble Hadîth insiste également sur de telles vertus et les recommande comme règle de conduite. C’est ainsi que le Prophète (Prière et salut sur lui), « Quand il prononçait un mot, il tenait à le reprendre trois fois afin de le rendre intelligible. Et quand il croisait des gens et les saluait, il répétait trois fois ses salutations »(69). A ce propos, ‘Â’icha (que Dieu l’agrée) a dit : « Les paroles de l’Envoyé de Dieu étaient claires et compréhensibles à quiconque les entendait »(70). On rapporte aussi, d’après Elle, que le Prophète (Prière et salut sur lui) a dit : « Dieu est Magnanime et Il aime l’indulgence. Il donne pour l’indulgence ce qu’Il ne donne ni pour la violence ni pour ce qui n’est pas indulgence »(71). Il lui a dit également : « Ô Âicha ! Sois indulgente, car l’indulgence dès qu’elle se mêle à une chose, elle l’embellit et dès qu’elle quitte une chose, elle l’enlaidit »(72). Le prophète (Prière et salut sur lui) a dit  également : « Celui qui s’abstient du mensonge alors qu’il a tort, il aura un édifice aux fondements du Paradis; celui qui s’abstient de la dispute alors qu’il a raison, il aura un édifice au centre du Paradis et celui qui se pare des bonnes mœurs, il aura un édifice au sommet du Paradis »(73). Il a dit aussi : « C’est déjà pour toi un grand péché que d’être un querelleur tenace »(74) Il a dit aussi :  « Les plus aimés de moi et les plus proches de moi le Jour de la Résurrection, sont ceux d’entre vous qui se parent des bonnes mœurs. Les plus détestés de moi et les plus éloignés de moi le Jour de la Résurrection sont ceux d’entre vous qui sont des bavards, des hâbleurs et des arrogants [al-mutafayhiqûn] ». Ils ont dit : « Ô Messager de Dieu ! Nous connaissons les bavards et les hâbleurs ; mais qui sont donc les arrogants ? » Il a dit : « Les vaniteux ! »(75). On sait d’ailleurs que le bavard (tharthâr) est une personne loquace et le hâbleur (mutashaddiq) est celui qui parle avec volubilité. L’Auguste Prophète (Que la prière et le salut soient sur lui) dit :

* « Le croyant ne doit pas attaquer la réputation de ses frères ni lancer des imprécations ni être insolent ni grossier »(76).

Exemples de dialogue dans le Saint-Coran

Les exemples qui suivent illustrent le dialogue d’Allah avec les diverses catégories de Ses créatures : Anges, Prophètes et même Iblîs (Satan) :

Premièrement : Dialogue avec les Anges

Dieu le Très-Haut a dit :

* « Lorsque Ton Seigneur confia aux Anges : ‘Je vais établir sur la terre un vicaire ‘Khalîfa’. Ils dirent :‘Vas-Tu y désigner un qui y mettra le désordre et répandra le sang, quand nous sommes là à Te sanctifier et à Te glorifier ?’ – Il dit : ‘En vérité, Je sais ce que vous ne savez pas !’. Et Il apprit à Adam tous les noms (de toutes choses), puis Il les présenta aux Anges et dit : ‘Informez-Moi des noms de ceux-là, si vous êtes véridiques !’ (dans votre prétention que vous êtes plus méritants qu’Adam). – Ils dirent : ‘Gloire à Toi ! Nous n’avons de savoir que ce que Tu nous a appris. Certes c’est Toi l’Omniscient, le Sage’. Il dit : ‘Ô Adam, informe-les de ces noms’. Puis quand celui-ci les eut informés de ces noms, Allah dit : ‘Ne vous ai-Je pas dit que Je connais les mystères des cieux et de la terre, et que Je sais ce que vous divulguez et ce que vous cachez ?’ »(77).

Ces nobles versets montrent qu’Allah le Très-Haut, quand Il créa Adam et lui insuffla son âme, Sa Volonté fut qu’Il en fasse Son vicaire sur la terre. Il énonça alors cette résolution aux Anges dans le but de les en tenir informés, dans un style qui signifie plutôt la consultation sur une affaire d’une gravité certaine. La réplique des anges fut tout étonnement et interrogation; car ils écartaient l’éventualité de voir Allah confier la lieutenance sur la terre à celui qui a comme penchant d’y semer le désordre et d’y répandre le sang; ce qui est incompatible avec le dessein d’Allah, à savoir le peuplement de la terre par la bonification, la discipline et l’ordre. Ainsi, tout en déléguant la décision au Très-Haut, ils estimaient qu’ils étaient mieux qualifiés pour une telle succession, eux qui glorifient Allah et Le considèrent exempt des attributs de de Ses propres créatures. Toutefois, le Très-Puissant les informa qu’Il en savait plus que eux ne pouvaient savoir. Cela veut dire qu’Il savait pertinemment qu’Adam disposait des aptitudes requises pour assumer une telle mission. Il s’agit de la science inspirée à Adam pour qu’il ait connaissance de tous les noms exprimant les choses existant dans l’univers. Or, dès qu’Allah a mis à nu l’ignorance des Anges quant à cette science qui leur faisait défaut et qu’Il ait dévoilé celle-ci par la voix d’Adam, les Anges se rendirent aussitôt compte de ce potentiel qui le destine à assurer la charge de la succession d’Allah sur la terre.

Deuxièmement : Avec les Prophètes

Nous retenons ici deux cas de figure du dialogue d’Allah avec Ses Prophètes :

1. Le dialogue avec Abraham (Prière et salut sur lui) , lorsqu’Il demanda Dieu de lui montrer comment Il ressuscitait les morts :

* « Et quand Abraham dit : ‘Seigneur ! Montre-moi comment Tu ressuscites les morts’, Allah dit : ‘Ne crois-tu pas encore ?’ – ‘Si ! dit Abraham ; mais que mon cœur soit rassuré’. – ‘Prends donc, dit Allah, quatre oiseaux, apprivoise-les (et coupe-les) puis, sur des monts séparés, mets-en un fragment ensuite appelle-les : ils viendront à toi en toute hâte. Et sache qu’Allah est Puissant et Sage.’ »(78).

Ainsi Abraham s’est-il adressé à son Seigneur en l’interrogeant avec déférence, sollicitude et délicatesse, plein d’avidité d’avoir une connaissance certaine fondée sur l’expérience oculaire. Il lui demandait comment Il ressuscitait les morts. Allah lui répliqua par une question rhétorique impliquant l’affirmation de la négation. Ce fut comme si Abraham n’était pas le destinataire du message, lui qui est le Prophète et l’Ami d’Allah. Les destinataires visés étaient plutôt ceux qui se poseraient des questions ou qui auraient encore des doutes. Il est probable qu’Abraham aspirait tant à entendre d’Allah, et de vive voix, qu’il avait été effectivement acquis à la foi; c’est pourquoi sa question allait dans ce sens. Sa réplique était formulée de telle façon qu’elle transformait une négation en une affirmation, notamment qu’il cherchait à se rassurer, à se calmer ou à être persuadé par la preuve empirique, concrète et palpable qui renforcerait l’argument intangible de la foi enracinée en lui par intuition. C’est pour cela que Dieu le Très-Haut lui avait ordonné de se saisir de quatre oiseaux qu’il couperait en morceaux et qu’il en appellerait les fragments inertes pour qu’ensuite ces derniers accourent vers lui, rassemblés comme ils étaient auparavant, en un oiseau intact et vivant. C’est là une interprétation possible de cette opération prodigieuse. Une autre lecture serait qu’Abraham répartisse les morceaux de l’oiseau sur quatre zones éloignées et qu’il les appelle ensuite pour qu’aussitôt ils accourent vers lui. En définitive, la morale de l’histoire est que Dieu le Très-Haut, dès lors qu’Il veut ressusciter les morts, ordonne de leur donner la vie. Aussitôt, ils obéissent sans tarder en se résignant à Sa Volonté.

2. Le dialogue avec Moïse (Prière et salut sur lui) qui est, dans le saint-Coran, le plus similaire à celui d’Allah avec Abraham l’Ami d’Allah. Dieu le Très-Haut a dit :

* « Et lorsque Moïse vint à Notre rendez-vous et que son Seigneur lui eut parlé, il dit : ‘Ô mon Seigneur, montre-Toi à moi pour que je Te vois !’ Il dit : ‘Tu ne Me verras pas ; mais regarde le Mont : s’il tient en sa place, alors tu Me verras. » Mais lorsque son Seigneur Se manifesta au Mont, Il le pulvérisa, et Moïse s’effondra foudroyé. Lorsqu’il se fut remis, il dit : ‘Gloire à Toi ! A Toi je me repens; et je suis le premier des croyants.’ Et (Allah) dit : ‘Ô Moïse, Je t’ai préféré à tous les hommes, par Mes messages et par Ma parole. Prends donc ce que Je te donne, et sois du nombre des reconnaissants’ »(79).

Moïse s’était présenté au rendez-vous qui lui avait été fixé, et Allah lui adressa des propos qu’il a pu entendre. On sait, d’après le Saint Coran, que le Très-Haut adresse Sa parole aux humains – et Il a effectivement parlé aux Prophètes -, par le truchement de trois modalités ; comme le souligne ce verset  où Il dit (Gloire à Lui !) :

* « Il n’a pas été donné à un mortel qu’Allah lui parle autrement que par révélation, par derrière un voile, ou qu’Il [lui] envoie un messager (Ange) qui révèle par Sa permission ce qu’Il [Allah] veut »(80).

Cependant, après que le Très-Haut et Très-Puissant lui ait parlé, Moïse aspirait à voir Sa Majesté et à contempler Son Essence. Toutefois, sa question eut comme réponse une négation assortie d’une restriction impliquant la raison de la négation. En effet, Allah lui demanda de regarder la montagne qui allait se pulvériser pour peu qu’ellel ait touché une infime partie de la Majesté du Très-Puissant; ce qui eut comme conséquence l’effondrement de Moïse. Or quelle aurait été sa réaction si Allah se fut manifesté et lui donna l’opportunité de Le voir comme il l’avait sollicité ?

Troisièmement : avec Iblîs (Satan)

Dieu le Très-Haut a dit :

*  » Nous vous avons créés, puis Nous vous avons donné une forme, ensuite Nous avons dit aux Anges : ‘Prosternez-vous devant Adam.’ Ils se prosternèrent, à l’exception d’Iblîs qui ne fut point de ceux qui se prosternèrent. [Allah] dit : ‘Qu’est-ce qui t’empêche de te prosterner quand Je te l’ai commandé ?’ Il répondit : ‘Je suis meilleur que lui : Tu m’as créé de feu, alors que Tu l’as créé d’argile’. [Allah] dit : ‘Descends d’ici, tu n’as pas à t’enfler d’orgueil ici. Sors, te voilà parmi les méprisés.’ ‘Accorde-moi un délai, dit (Satan), jusqu’au jour où ils seront ressuscités.’ [Allah] dit : ‘Tu es de ceux à qui délai est accordé.’ ‘Puisque Tu m’as mis en erreur, dit [Satan], je m’asseoirai pour eux sur Ton droit chemin, puis je les assaillerai de devant, de derrière, de leur droite et de leur gauche. Et, pour la plupart, Tu ne les trouveras pas reconnaissants.’ ‘Sors de là’, dit [Allah], banni et rejeté. Quiconque te suit parmi eux…de vous tous, J’emplirai l’Enfer »(81).

Ce dialogue illustre l’attitude d’Allah le Très-Haut vis-à-vis d’Iblis qui refusa de se prosterner, désobéissant ainsi à l’ordre divin. Allah l’interrogea sur la raison de ce refus et il répondit qu’il était meilleur qu’Adam par l’essence de la matière dont il a été façonné. C’est ainsi que le Très-Puissant (Gloire à Lui) lui intima l’ordre de descendre de sa position, à cause de l’arrogance qui ne lui sera jamais pardonnée. Cette descente ne fut pas sans être renforcée par une sortie qui confirme le mépris et l’humiliation de Satan.

Le dialogue se poursuit par la réplique d’Iblîs qui demanda à Allah de lui accorder un délai jusqu’au Jour de la Résurrection. Dieu lui répondit alors qu’il serait en effet parmi ceux à qui le délai fut accordé; conformément à ce qui était écrit et conçu préalablement par l’omniscience et d’Allah le Très-Haut. Néanmoins, Satan rétorqua qu’en conséquence à sa mise en erreur par Dieu, il se mettra sur le chemin d’Adam et de sa descendance, et qu’il les assaillira de tous les côtés afin qu’ils s’égarent et ainsi ils ne seront plus ni obéissants ni reconnaissants.

Le dialogue s’achève par la condamnation de Satan à quitter le Paradis, essuyant l’humiliation et le mépris, alors qu’Allah le menaçait, lui et ceux qui le suiveraient, de Géhenne (l’Enfer).

Dans le même contexte, le Saint-Coran nous rapporte de nombreux autres dialogues avec Iblîs. Ainsi, Dieu le Très-Haut a dit :

* « Et lorsque Nous avons dit aux Anges : ‘Prosternez-vous devant Adam’, ils se prosternèrent, à l’exception d’Iblîs, qui dit : ‘Me prosternerai-je devant quelqu’un que Tu as créé d’argile ?’ Il dit encore : ‘Vois-Tu ? Celui que Tu as honoré au dessus de moi, si Tu me donnais du répit jusqu’au Jour de la Résurrection, j’éprouverai, certes, sa descendance, exceptés un petit nombre [parmi eux]’. Et [Allah] dit : ‘Va-t-en ! Quiconque d’entre eux te suivra … votre sanction sera l’Enfer, une ample rétribution. Excite, par ta voix, ceux d’entre eux que tu pourras, rassemble contre eux ta cavalerie et ton infanterie, associe-toi à eux dans leurs biens et leurs enfants et fais-leur des promesses’. Or le Diable ne leur fait des promesses qu’en tromperie. Quant à Mes serviteurs, tu n’as aucun pouvoir sur eux’. Et ton Seigneur suffit pour les protéger »(82).

Ainsi, comme son précédent, ce dialogue s’ouvre sur l’ordre de se prosterner à Adam. Or Iblîs, qui est foncièrement rebelle, se refuse à exécuter l’ordre divin, en arguant l’infériorité de l’argile, élément à partir duquel Adam fut créé et pourtant celui-ci fut préféré et plus honoré que lui. Il osa ensuite faire affront à Allah en jurant que s’Il lui accordait un délai jusqu’au Jour de la Résurrection, il débaucherait et égarerait la descendance d’Adam, à l’exception de quelques-uns parmi les serviteurs dévoués. La réponse du Tout-Puissant vint alors chargée de mépris à l’endroit d’Iblîs et de son défi à entreprendre ce qui est dans son pouvoir et d’user de tous ses moyens pour assaillir, séduire et dérouter les fils d’Adam, tant qu’il reste incapable d’attenter aux fidèles serviteurs d’Allah qui jouissent de Sa Protection.

Il est à signaler que dans un autre dialogue similaire à celui-ci, Iblîs s’était adressé au Créateur Suprême dans ces termes :

* « Il dit : ‘Ô mon Seigneur, donne-moi donc un délai jusqu’au jour où ils (les gens) seront ressuscités’. [Allah] dit : tu es de ceux à qui ce délai est accordé, jusqu’au jour de l’instant connu [d’Allah]. Il dit : ‘Ô mon Seigneur, parce que Tu m’as induit en erreur, eh bien je leur enjoliverai la vie sur terre et les égarerai tous’ »(83).

Ainsi il a utilisé le terme « Mon Seigneur ! », malgré sa désobéissance, et il a procédé par courtoisie (Talattuf) en dialoguant avec Allah auquel il reconnaît la Divinité (Rubûbia) et dont il sollicite la miséricorde afin qu’il exauce son vœu. Le même discours se retrouve assorti du serment par la Gloire d’Allah, dans le dialogue où il est dit :

* « ‘Seigneur, dit [Iblîs], donne-moi donc un délai, jusqu’au jour où ils seront ressuscités.’; ‘Par Ta puissance, dit [Satan]. Je les séduirai assurément tous, sauf Tes serviteurs élus parmi eux.’ »(84).

Conclusion

A la lumière de cette conception coranique, il apparaît que l’Islam est manifestement une religion de dialogue:

1. ll vénère l’être humain, pour lui-même, et le respecte en tant que tel et quel qu’il soit, en le considérant comme étant honoré, conformément à la volonté de Dieu. En effet, Allah le Très-Haut a dit :

* « Certes, Nous avons honoré les fils d’Adam »(88).

2. Il confirme la différence que Dieu a établie comme caractéristique inhérente aux humains et comme une des règles de l’univers. Dieu le Très-Puissant a dit :

* « Et si ton Seigneur avait voulu, Il aurait fait des gens une seule communauté. Or, ils ne cessent d’être en désaccord (entre eux), sauf ceux à qui ton Seigneur a accordé miséricorde. C’est pour cela qu’Il les a créés »(89).

Cette différence s’étend même jusqu’à toucher la conviction religieuse (‘aqîda) . Dieu le Très-Haut a dit :

* « Et si ton Seigneur l’avait voulu, tous ceux qui sont sur la terre auraient cru. Est-ce à toi de contraindre les gens à devenir croyants ? »(90).

3. Il remet le sort de cette différence en matière de religion à l’appréciation et au jugement du Créateur le Très-Haut, Lui qui a dit :

* « Au Jour de la Résurrection, ton Seigneur jugera certainement au sujet ce dont ils divergeaient »(91).

* « Car c’est ton Seigneur qui connaît le mieux celui qui s’égare de Son sentier et C’est Lui qui connaît le mieux ceux qui sont bien guidés »(92).

4. En dépit de tout cela, l’Islam associe la foi en Dieu et en Son Noble Envoyé à la croyance aux autres Livres révélés et en les Messagers antérieurs. Dieu le Très-Haut a dit :

* « Le Messager a cru en ce qu’on fait descendre vers lui venant de son Seigneur, et aussi les croyants : tous ont cru en Allah, en Ses anges, à Ses livres et en Ses messagers; (en disant) : Nous ne faisons aucune distinction entre Ses messagers »(93).

5. Ce faisant, il stigmatise le fanatisme quelle qu’en soit la nature. Il exhorte à la cohabitation, à la convivialité et à l’échange des intérêts et des profits, dans une acception nettement globale et extrêmement étendue qui se ramène à la connaissance mutuelle dont le Très-Haut a valorisé la dimension à telle enseigne qu’elle subsume toutes formes de différence. Aussi, Dieu le Très-Puissant a-t-il dit

* « Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez. Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allah, est le plus pieux »(94).

6. Ainsi, la première manifestation de cette connaissance mutuelle réside en effet dans la propagation de l’affection et de la sympathie parmi les humains, dans un esprit d’amitié et de fraternité. A ce propos, Dieu le Très-Haut a dit :

* « Les croyants et les croyantes sont alliés les uns des autres »(95).

* « Les croyants ne sont que des frères »(96).

Cette alliance fraternelle des croyants va même jusqu’à ce qu’ils soient considérés comme un seul corps, comme l’a bien dit l’Auguste Envoyé de Dieu (Prière et salut sur Lui) :

* « Dans leur affection, leur compassion et leur sympathie, les uns envers les autres, les croyants sont tels un même corps, lorsqu’un organe en souffre, l’ensemble de l’organisme en pâtit par l’insomnie et la fièvre »(97).

7. Il en résulte alors le fait que la communauté se caractérise par la solidarité qui implique les uns portent assistance aux autres ; ce qui préserve à tous un minimum vital des intérêts fondamentaux et des droits nécessaires qui conditionnent la vie en dignité et en noblesse. Une telle solidarité est également de nature à repousser les nuisances qui entravent cette vie saine, dans la perspective de la respectabilité honorable à laquelle aspire tout individu. Cette solidarité acquiert une importance telle qu’elle atteint un degré où la foi en est tributaire. En effet, Le Prophète (Prières et Salut de Dieu sur Lui) a dit :

* « Nul d’entre vous ne peut être croyant tant qu’il n’aime pas pour son frère ce qu’il aime pour lui-même »(98).

8. Une telle solidarité entre les membres de la communauté ne dispense personne de se sentir responsable et d’assumer sa responsabilité dans les limites de ses compétences et de ses latitudes, conformément aux propos de l’Envoyé de Dieu (Prière et salut sur Lui) :

* « Vous êtes tous des pâtres et vous êtes tous responsables de votre bétail. Le prince est un pâtre; l’homme est le pâtre de sa famille, la femme est pâtre sur le foyer de son époux et sur les enfants de celui-ci. Ainsi, vous êtes tous des pâtres et vous êtes tous responsables de vos sujets »(99).

9. Dans les limites de cette responsabilisation, l’Islam permet et confirme tous les droits, à commencer par le droit à la liberté qu’il estime inhérente à l’homme par nature et instinct; comme cela est bien ressorti du propos de ‘Umar Ibn Al-Khattâb (Que Dieu l’agrée) qui a dit, tout indigné de voir abolir cette liberté et la spolier à l’être humain : « Depuis quand vous asservissez les gens alors que leurs mères les ont enfantés libres? ».

A cet égard, il suffit de signaler la liberté d’expression que le Saint-Coran considère comme un bienfait qu’il cite immédiatement après le privilège de la création. Ainsi, Dieu le Très-Haut a dit : « Le Tout Miséricordieux. Il a enseigné le Coran. Il a créé l’homme. Il lui a appris à s’exprimer clairement »(100). Mieux, cette liberté va même jusqu’à concerner la religion. Dieu le Très-Haut a dit : « Nulle contrainte en religion ! »(101).

10. Dans le contexte de cette liberté, l’Islam exhorte au dialogue serein et à la discussion la plus amicale avec les non-musulmans et il interdit toute autre modalité qui va à l’encontre de cette attitude. Dieu le Très-Haut a dit :

* « Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon »(102).

Il dit aussi :

* « Et ne discutez que de la meilleure façon avec les gens du Livre »(103).

Nul doute que c’est la meilleure orientation méthodique pour mener un dialogue.

11. Ainsi, l’Islam exhorte à éviter toutes les raisons de dissension et de conflits qui ne servent l’intérêt de personne. Le Tout-Puissant a dit à ce propos :

* « Et craignez une calamité qui n’affligera pas exclusivement les injustes d’entre vous »(104).

12. Toutefois, en matière de tractation avec les non musulmans, l’Islam établit une nette distinction entre ceux qui combattent les musulmans et ceux qui sont pacifistes à leur égard. Dieu le Très-Puissant a dit :

* « Allah ne vous défend pas d’être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Allah aime les équitables. Allah vous défend seulement de prendre pour alliés ceux qui vous ont combattus pour la religion, chassés de vos demeures et ont aidé à votre expulsion. Et ceux qui les prennent pour alliés sont les injustes »(105).

Ce comportement tolérant va même jusqu’à l’alliance parentale avec les gens du Livre et au partage de leur nourriture. Dieu le Très-Haut a dit :

* « Vous sont permises, aujourd’hui, les bonnes nourritures. Vous est permise la nourriture des gens du Livre, et votre propre nourriture leur est permise. (Vous sont permises) les femmes vertueuses d’entre les croyantes, et les femmes vertueuses d’entre les gens qui ont reçu le Livre avant vous »(106).

En définitive, le dialogue, tel qu’il se présente en Islam, est le moyen idéal pour parvenir à la vérité. En effet, lorsque, de nos jours, on médite sur la réalité de la vie et de l’humanité à la lumière du dialogue, on se résout à en admettre qu’il est indispensable pour établir l’intercompréhension, pour renforcer la coopération et pour rapprocher les gens en dépit de leurs divergences. Ceci est d’autant plus probant que les distances se sont dissipées, ou presque, entre les continents et les communautés et que les moyens de communication se sont renforcés et se sont multipliés partout dans le monde. C’est ainsi que peut se réaliser la connaissance mutuelle à laquelle l’Islam ne cesse d’inviter et part laquelle la paix authentique va s’établir.

Notes

1. Voir La stratégie culturelle du monde islamique. Publications de l’ISESCO, 1997 (1418 H), notamment, pp. 49, 50, 56, 63, 64, 65.

2. Publications de l’ISESCO, 1997 (Texte édité en arabe et traduit en français et en anglais).

3. (3) Outre ce qui précède, il est à mentionner les nombreuses rencontres du dialogue entre l’Islam et le Christianisme, tenues en France, en Suisse, en Italie, en Autriche, en Yougoslavie, au Sri Lanka (Colombo), en Tunisie, en Libye, à Jérusalem et à Beyrouth. D’autres réunions ont eu lieu et auxquelles ont pris part des participants juifs. C’est le cas de la réunion de Lisbonne (Portugal), du 3 novembre 1977, autour du thème : «Le monde en mutation : le défis de nos religions» et celle de novembre à Kuala Lumpur (Malaisie) sur «Le dialogue religieux et les problèmes qu’il suscite». Concernant ce dialogue, voir l’ouvrage de Alex Juar Veski :  L’Islam et le Christianisme; traduction en arabe, Dr Khalaf Mohammed Al Jarad, éd. Série «‘Âlam al-Ma’rifa», n° 215, novembre 1996 (Joumada II 1417 H).

4. (1) Al-Inshiqâq (La Déchirure), v. 14.

NB. Pour la traduction des versets coraniques, nous utilisons : Le Saint Coran et la traduction en langue française du sens de ses versets. Révisé et édité par La Présidence Générale des Directions des Recherches Scientifiques Islamiques, de l’Ifta, de la Prédication et de l’Orientation religieuse,  Royaume d’Arabie Saoudite.

5. (1) Al-Kahf (La Caverne), v. 34.

6. (2) Ibid., v. 37.

7. (3) Al-Mujâdala (La discussion), v. 1.

8. (1) Al-Kahf (La Caverne), v. 54.

9. (2) Az-Zukhruf (L’Ornement), v. 58.

10.  (3) Al-Kahf (La Caverne), v. 55.

11.  (4) Al-Baqara (La Vache), v. 196.

12.  (5) Hûd, v. 32.

13.  (1) An-Nahl (Les abeilles), v. 125.

14.  (2) Al-Kahf (La Caverne), v. 23.

15.  (1) Az-Zukhruf (L’Ornement), v. 61.

16.  (2) Al-Baqara (La Vache), v. 147.

17.  (3) Hûd, v. 17.

18.  (4) Rapporté par Ibn Hanbal, At-Tirmîdhî, et Ibn Mâja, d’après Abû ‘Umâma.

19.  (5) Rapporté par At-Tirmadhî, d’après Ka’b ibn Mâlik.

20.  (1) Al-Baqara (La Vache), v. 188.

21.  (2) L’Heure dont parle le Coran est celle de la fin du monde qui précédera immédiatement le jour du jugement dernier.

22.  (3) Al-A’râf (Les Redans), v. 187.

23.  (4) Al-Mâ’idah (La Table servie), v. 101.

24.  (5) An-Nisâ’ (Les Femmes), v. 153.

25.  (1) Al-‘Ankabût (L’Arraignée), v. 61.

26.  (2) Ibid., v. 63.

27.  (3) Loqmân, v. 25 et Az-Zumar (Les Groupes), v. 38.

28.  (4) Az-Zukhruf (L’Ornement), v. 87.

29.  (5) Ar-Rûm (Rome), v. 22.

30.  (6) Al-Mâ’idah (La Table servie), v. 48.

31.  (1) Al-Kâfirûn (Les Infidèles), v. 6.

32.  (2) Al-Isrâ’  (Le Trajet nocturne), v. 70.

33.  (3) Al-Mâ’idah (La Table servie), v. 3.

34.  (4) Al-Hujurât (Les Appartements), v. 13.

35.  (5) Âl-‘Imrân (La Famille d’Imrân), v. 199.

36.  (1) An-Nisâ’ (Les Femmes), v. 162.

37.  (2) Al-Mâ’idah (La Table servie), v. 82 et 83.

38.  (3) Al-Hujurât (Les Appartements), v. 11.

39.  (4) An-Nisâ’ (Les Femmes), v. 148.

40.  (5) Al-An’âm (Les Bestiaux), v. 108.

41.  (1) Âl-‘Imrân (La Famille d’Imrân), v . 64.

42.  (2) Yûsuf (Joseph), v. 108.

43.  (3) Al-Isrâ’ (Le Voyage nocturne), v. 36.

44.  (4) Az-Zukhruf (L’Ornement), v. 63.

45.  (5) Loqmân, v. 20.

46.  (6) Ghâfir (Le Pardonneur), v. 56.

47.  (1) Al-Wâqi’ah (L’Evènement), v. 57 à 74.

48.  (1)   Al-Baqara (La Vache), v. 260.

49.  (2)   (1) Ash-Shûrâ (La Consultation), v. 15 et 16.

50.  (3)   (2) An-Nisâ’ (Les Femmes), v. 174. Une preuve évidente …une lumière : le Coran. (NDT).

51.  (4)   (3) Al-Baqara (La Vache), v. 111.

52.  (5)   (4) An-Nisâ’ (Les Femmes), v. 59.

53.   (1) Âl-‘Imrân (La Famille d’Imrân), v. 93.

54.  (2) Al-Baqara (La Vache), v. 258.

55.  (1) Maryam (Marie), v. 41 à 48.

56.  (2) Attawbah (Le Repentir), v. 114.

57.  (3) Hûd, v. 75.

58.  (1) Tâ-Hâ, v. 42 à 48.

59.  (2) Hûd, v. 50; et Al-‘A’râf, v. 65.

60.  (3) Al-‘A’râf, v. 73; Hûd, v. 61 et An-Naml (Les Fourmis), v. 45.

61.  (4) Al-’A’râf, v. 85; Hûd, v. 84 et Al-‘Ankabût (L’Arraignée), v. 36.

62.  (1) Hûd, v. 34.

63.  (2) Âl-‘Imrân (La Famille d’Imrân), v. 159.

64.  (3) Al-Baqarah (La Vache), v. 83.

65.  (4) Al-‘An’âm (Les Bestiaux), v. 152.

66.  (5) Al-‘A’râf, v. 199.

67.  (6) Fussilat (les versets détaillés), v. 33, 34 et 35.

68.  (7) As-Sajda (La Prosternation), v. 24.

69.  (1) Rapporté par Al-Bukhârî, d’après Anas.

70.  (2) Rapporté, d’après Elle, par Abû Dawûd

71.  (3) Rapporté par Al-Bukhârî, Muslim, Abû Dâwûd et At-Tirmidhî.

72.  (4) Rapporté par Muslim et Abû Dâwûd.

73.  (5) Rapporté par At-Tirmidî et Abû Dâwûd, d’après Anas.

74.  (6) Rapporté par At-Tirmidî, d’après Ibn ‘Abbâs.

75.  (7) Rapporté par At-Tirmidhî, d’après Jâbir.

76.  (8) Rapporté par At-Tirmidhî, d’après ‘Abdullâh ibn ‘Abbâs.

77.  (1)   Al-Baqarah (La Vache), v. 30 à 33.

78.  (2)   (1) Al-Baqarah (La Vache), v. 260.

79.  (3)   (1) Al-‘A’râf, v. 143 et 144.

80.  (4)   (2) Ash-Shûrâ (La Consultation), v. 51.

81.  (5)   (1) Al-‘A’râf, v. 11 à 17.

82.  (6)   (1) Al-‘Isrâ’ (Le Voyage nocturne), v. 61 à 65.

83.  (7)   (2) Al-Hijr, v. 36 à 39.

84.  (8)   (3) Sâd, v. 79, 82 et 83

Source : http://alhassanain.org/french

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